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Page:London - Contes des mers du Sud, trad. Postif et Gruyer, 1948.djvu/94

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s’élancera à l’assaut, bien décidé à emporter la place et à faire ensuite, à coups de trique, trimer pour lui Satan en personne.

« C’est idiot et magnifique à la fois. »

Le capitaine Woodward se prit à rire, d’un air entendu. De lointains souvenirs se mirent à luire dans ses prunelles et, après que Roberts eut mélangé trois nouveaux Abou-Hamed, il nous conta :

« Il y a de cela vingt ans, Saxtorph était son nom. Cela se passait à Apia, ici même où nous sommes aujourd’hui.

« Je n’ai jamais rencontré un homme plus dénué de toute culture intellectuelle. Il ne savait qu’une chose : tirer à point. À cela, par contre, il s’entendait admirablement et il était sur ce chapitre, inéluctable comme la mort même.

« J’étais alors second sur la Duchesse, une belle goélette de cent cinquante tonneaux, affectée au recrutement des noirs. J’étais descendu à terre et logeais à l’hôtel, que tenait un Hollandais, nommé Henry.

« C’est du passé, Roberts, que vous n’avez pas connu. Vous n’êtes venu que par la suite vous installer dans l’île. L’hôtel, qui était fort rudimentaire, n’existe plus. Il se trouvait sur la place actuelle du marché.

« Le Hollandais se livrait en outre à la contrebande des armes. Ce qui lui attira des ennuis. Il dut déguerpir un beau jour, passa en Australie et y fut tué, à Sydney, au cours d’une rixe dans un bar.

« Saxtorph, John Saxtorph exactement, un petit