Page:London - Croc-Blanc, 1923.djvu/128

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

mouvement de ces frères de race eût été de bondir sur lui et de tenter de l’anéantir.

Il était non moins chagrin de voir sa mère attachée avec un bâton, même en pensant que c’était la sagesse supérieure des animaux-hommes qui l’avait voulu. Cela sentait l’esclavage. À l’esclavage il n’avait pas été habitué. La liberté de rôder, de courir, de se coucher par terre, là où il lui plaisait, avait été son lot jusqu’à ce jour et, maintenant, il était captif. Les mouvements de sa mère étaient réduits à la longueur du bâton auquel elle était liée. Et à ce même bâton il était comme lié lui-même, car il n’avait pas encore eu l’idée qu’il pouvait se séparer de sa mère.

Il n’aima pas cette contrainte. Il n’aima pas non plus quand les animaux-hommes, s’étant levés, se remirent en marche. Un animal-homme, malingre d’aspect, prit dans sa main la lanière du bâton qui attachait Kiche et emmena la louve derrière lui. Derrière Kiche suivait Croc-Blanc, grandement perturbé et tourmenté par la nouvelle aventure qui s’abattait sur lui.

Le cortège descendit la vallée, continuant bien au-delà des plus longues courses du louveteau, jusqu’au point où le torrent se jetait dans le fleuve Mackenzie. À cet endroit, des canots étaient juchés en l’air, sur des perches, et s’étendaient des claies destinées à faire sécher le poisson.

On s’arrêta et on campa. La supériorité des animaux-hommes s’affirmait de plus en plus. Plus encore que leur domination sur les chiens aux dents aiguës, ce spectacle marquait leur puissance. Grâce à leur pouvoir d’imprimer du mouvement