Page:London - Croc-Blanc, 1923.djvu/272

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comme ils l’avaient acculé dans un coin, entre un rocking-chair et un banc, il gronda sauvagement, en essayant de se dégager. La femme de Scott eut un frémissement.

— Je tremble toujours, dit-elle, qu’il ne se jette sur eux, quelque jour, sans crier gare.

— Un loup est un loup ! prononça sentencieusement le juge Scott. Il est prudent de ne pas s’y fier. Sans doute y a-t-il en lui quelques gouttes de sang de chien…

Il n’avait pas achevé sa phrase qu’il aperçut devant lui Croc-Blanc, qui grondait, avec une mine singulière.

— Allez-vous-en, Sir ! Allez coucher ! ordonna le juge.

Croc-Blanc se retourna vers la femme du maître et saisit avec ses dents le bas de sa robe, tirant sur la fragile étoffe jusqu’à ce qu’il l’eût déchirée. Alice poussa un cri de frayeur.

— J’espère qu’il n’est pas devenu enragé, dit la mère de Scott. J’ai toujours répété à mon fils que notre chaud climat ne valait rien pour un animal venu de l’Arctique.

Croc-Blanc maintenant s’était tu et ne grondait plus. Il demeurait immobile, la tête levée, et regardant en face la famille qui le fixait. Des spasmes muets lui secouaient la gorge, et tout son corps se convulsait, comme s’il eût tenté d’exprimer l’inexprimable.

— On croirait, dit Beth, qu’il essaie de parler !

à ce moment, la parole vint à Croc-Blanc, sous la forme d’un aboiement éclatant. Ce fut le second