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TERRE D’ÉBÈNE

basse d’eau, alors que je lui en demandais un verre. Il me fit comprendre qu’il désirait ne pas me donner de ce liquide, dont lui-même ne boirait pas.

Royaume des féticheurs, c’est-à-dire du poison, le Dahomey est dans la main des sorciers. Il est à la fois le pays noir le plus avancé et le plus secret. Mgr Steinmetz, notre évêque, le sait bien, lui, qui dut intervenir cette semaine auprès des prêtres du diable, sans quoi son missionnaire, touché l’autre jour par trois féticheurs voilés, alors qu’il rentrait à bicyclette sur la route de Kalavi, serait mort déjà. Son bras s’était raidi, puis desséché, le mal gagnait l’épaule, la poitrine. Monseigneur fit venir le chef féticheur, qui lui dit : « Ô grand blanc ! le respect que tu m’inspires m’oblige à dire que mes revenants ont fait cela. — Ô grand féticheur, répondit le prélat, en amour de moi, tu vas guérir mon serviteur. » Le contre-poison fut donné. Le missionnaire, aujourd’hui, m’a serré la main d’une main valide.

Féticheurs et féticheuses en tutu froufroutant pullulaient aux funérailles de Behanzin. Ouanilo faisait un grand détour pour les éviter.

À la nuit, le boy fidèle du commandant français entrait dans la demeure de l’avocat de Bordeaux : il apportait des boîtes de conserves sur lesquelles les prêtres de Maon n’avaient pu laisser tomber leur regard.