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Nous nous sommes fondé sur un passage de son épître au docteur Gregorio de Angulo, où Lope s’exprime ainsi :

Crióme don Geronimo Manrique,
Estudié en Alcala, bachilléreme,
y aun estuve de ser clerigo á pique :
Cegóme una muger, afinionéme,
Perdone se lo Dios, ya soi casado.

« Élevé par don Géronime Manrique, j’étudiai à Alcala, je pris le grade de bachelier, et j’étais sur le point de devenir prêtre : je m’amourachai d’une femme, je m’attachai à elle ; et, Dieu le lui pardonne, me voilà marié. »

Il semble résulter de là que Lope serait sorti de chez don Géronime pour se marier ; et en effet, à la veille de devenir prêtre, il était naturel qu’il se trouvât chez un évêque plutôt que chez un grand seigneur.

Des enfants légitimes de Lope.

Voici un autre point, assez délicat. Nous avons dit que Lope avait eu trois enfants : — Carlos, né en 1599 ; Lope, né en 1605, et Feliciana, venue au monde en 1608. Or, comme Montalvan garde un silence absolu touchant le jeune Lope, l’un des précédents biographes, M. Labeaumelle en a conclu que cet enfant n’était pas légitime. Voici quelques vers de Lope qui doivent dissiper tous les doutes à cet égard.

Dans l’Églogue à Claudio, après avoir raconté l’époque heureuse de sa vie, et au moment d’arriver à ses malheurs, il dit :

Yo vi mi pobre mesa en testimonio
Cercada y rica de fragmentos mios,
Dulces y amargos rios
Del mar del matrimonio
, etc., etc.

« J’ai vu ma table modeste richement entourée de mes rejetons, doux et amers ruisseaux de la mer du mariage, etc. etc. »

Or, comme le jeune Carlos mourut à l’âge de huit ans, en 1607, un an avant la naissance de Feliciana, il suit de là qu’il fallait nécessairement que le petit Lope fût légitime pour que Lope de Vega eût pu voir à la fois deux de ses rejetons nés du mariage assis à sa table.