Page:Lope de Vega - Théâtre traduction Damas-Hinard tome 2.djvu/130

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Le Commandeur.

Emmenez-le, attachez-le à ce chêne, dépouillez-le de ses habits, et avec les brides de vos chevaux…

Mengo.

Pitié ! pitié, monseigneur ! Songez, de grâce, à votre noblesse.

Le Commandeur.

Fouettez-le jusqu’à ce que les boucles des courroies se détachent.

Mengo, à part.

Ô ciel ! et tu permets que de telles actions demeurent impunies !

On l’emmène.
Le Commandeur.

Et toi, villageoise, pourquoi fuyais-tu ? Tu préfères donc un misérable paysan à un homme de ma sorte ?

Jacinthe.

Est-ce ainsi, monseigneur, que vous faites réparation à mon honneur, que vos gens ont outragé ?

Le Commandeur.

Avoir voulu t’enlever n’est pas un outrage.

Jacinthe.

Si fait. Mon père est un homme d’honneur ; et si sa naissance n’égale pas la vôtre, il vous est supérieur en vertu.

Le Commandeur.

Ce n’est pas par l’insolence et les injures que l’on apaise la colère. Viens par ici.

Jacinthe.

Avec qui ?

Le Commandeur.

Avec moi.

Jacinthe.

Songez-y bien !

Le Commandeur.

Malheureusement pour toi, j’y ai songé. — Je renonce à ta personne ; mais je te réserve pour les goujats de l’armée.

Jacinthe.

Tant que je vivrai, il n’y a pas de puissance humaine à qui il soit donné de me faire un tel outrage.

Le Commandeur.

Allons, drôlesse, marchons.

Jacinthe.

Par pitié, monseigneur !

Le Commandeur.

Il n’y a point de pitié.

Jacinthe.

J’en appelle de votre cruauté à la justice divine.

Ils sortent.