Page:Lorain - Tableau de l’instruction primaire en France.djvu/223

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pendant l’hiver. Des particuliers aisés suivent leur exemple sans avoir leurs motifs.

Gers ; arr. de Mirande, cant. de Marciac. — Je ne crois pas me tromper, en affirmant que, terme moyen, les enfants ne fréquentent pas les écoles trois mois de l’année, même dans l’âge le plus tendre. Quelque jeunes qu’ils soient, ils sont employés à la garde des troupeaux.

Landes ; arr. de Mont-de-Marsan, cant. de Labrit et Sorce. — « Nos pères ont toujours eu du pain et ils n’ont jamais su lire ni écrire » ; voilà ce que répondent les paysans qui habitent les vastes landes des cantons de Sorce et de Labrit. Vainement on s’efforcerait de leur faire sentir les avantages que l’éducation apporte avec elle ; ces hommes grossiers savent apprécier un pâtre soigneux, et n’ont jamais pensé qu’il fallût se donner quelque peine pour le choix d’un instituteur. L’enfant n’entend jamais prononcer le nom d’école. À peine il sait marcher, qu’on l’exerce à conduire un troupeau, à soigner une brebis malade, à ne pas s’égarer au milieu de ces plaines que des sentiers sans nombre traversent dans tous les sens. Uniquement occupé de son bétail, le jeune pâtre ne voit ses parents que le dimanche matin ; le reste de la semaine, il vit seul, rarement il se réunit à un autre berger aussi simple et aussi grossier que lui.

Loir-et-Cher ; arr. de Vendôme. — À sept ou huit ans et même plutôt, les enfants sont employés, dès le mois de mars, à garder des oies, des canards, des vaches, et plus tard à cueillir de l’herbe et à une foule d’autres travaux qui évitent au cultivateur un domestique.

Meuse ; arr. de Bar, cant. de Triancourt. — L’exercice du droit de vaine pâture sera toujours un obstacle insurmontable pour l’amélioration morale de la jeunesse des campagnes. Là, elle trouve une école de corruption et de vices, alimentée encore par l’ignorance dans laquelle elle croupit, privée qu’elle est de toute espèce d’instruction. Nous ne pouvons mieux faire ressortir toutes les turpitudes qui résultent du déplorable droit de vaine pâture, qu’en empruntant les pensées et les expressions du célèbre agronome M. Matthieu de Dombasle, qui s’exprime ainsi :

« La garde des bestiaux forme, dans ce système (celui de vaine pâture), l’occupation principale du plus grand nombre des jeunes gens de la classe peu aisée des habitants de chaque village. L’un garde la vache de ses parents, et souvent même deux ou trois se réunissent pour cette occupation ; l’autre garde les chevaux d’un cultivateur.

« Une vie oisive et indépendante présente tant d’attraits à cet âge, qu’on voit souvent ceux qui n’y sont pas envoyés par leurs parents, et même les enfants des cultivateurs aisés, aller se réunir à leurs camarades, et passer avec eux le plus de temps qu’ils peuvent. C’est là que cette jeunesse reçoit ces premières impressions, contracte ces premières habitudes qui influent d’une manière si puissante sur les dispositions de l’homme pendant toute sa vie.

« On sait assez de quel genre sont les habitudes qu’ils contractent