Page:Lorain - Tableau de l’instruction primaire en France.djvu/307

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Toutefois, il ne faut pas se le dissimuler, l’intérêt de l’instruction primaire exige que l’on apporte, à ces transactions secrètes entre l’instituteur et les autorités de la commune, la surveillance la plus assidue : autrement, le but de la loi serait manqué ; et les instituteurs au rabais, qui prendraient possession de leur privilége comme instituteurs communaux, sans en exiger les émoluments, ne pourraient que ruiner l’instruction remise entre leurs mains.

Jura ; arr. de Saint-Claude. — Souvent les cabales fixent seules le choix des autorités qui, comme je l’ai déjà dit, incapables de juger des connaissances d’un instituteur, prennent celui qui est de l’endroit, et par là même, plus en état que tout autre, de faire une remise considérable sur le traitement que la loi lui accorde ; mais, par là même, aussi, moins capable de faire le bien, donnant toujours moins de soins à la classe qu’à ses champs et à sa famille.

Nord ; arr. de Cambrai, cant. de Marcoing. — À R...., commune de seize cents âmes, et où ne se trouve aucune institutrice, le conseil municipal, pour obéir à la loi, a voté 200 francs de traitement et 100 francs d’indemnité de logement, en faveur du sieur N...., mais à condition que cet instituteur remettra, chaque année, au sieur N...., 150 francs, sans rien dire. Plusieurs communes ont déjà suivi cet exemple.

Nord ; arr. de Cambrai, cant. de Solesnes. — Dans certaines localités, les instituteurs ne recevront peut-être qu’une partie de ce minimum :

Ici, c’est un jeune homme qui demande à être instituteur communal, uniquement pour être exempt du service militaire ; mais, comme il est peu instruit et qu’il craint des concurrents plus habiles, il s’adresse aux économistes de la commune, et offre la remise d’une partie du traitement que la loi accorde à un instituteur ; par là, il est sûr d’être bien accueilli et d’écarter des compétiteurs plus capables que lui. Là, sont deux instituteurs, dont l’un n’a pas d’habitation, et l’autre en a une ; celui-ci est peu propre à remplir les fonctions auxquelles il aspire, mais, comme il veut une place à tout prix, et qu’il a une maison, il offre à la commune la remise de l’indemnité de logement ; c’est une économie toute claire, un argument sans réplique, et cela suffit pour qu’il soit choisi par le conseil municipal, dont la majeure partie sait à peine lire. Ailleurs, c’est un maître d’école tout-à-fait incapable, ou d’une mauvaise conduite, ou négligeant entièrement les devoirs de son état ; tout le monde le sait, tout le monde s’en plaint. Un autre instituteur vient s’établir dans la commune ; il est d’une conduite régulière, il a du zèle et tient bien son école ; il gagne bientôt l’affection des élèves, l’estime et la confiance des parents ; ceux-ci lui confient leurs enfants, et l’ancienne école devient déserte. Il s’agit maintenant de choisir un instituteur communal. Tout le monde convient que le nouveau doit être préféré à l’ancien ; mais celui-ci s’y oppose ; il veut gar-