Page:Lorrain, Jean - Sonyeuse, 1891.djvu/33

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on ne sait comment, mystérieuse et sauvage, au milieu des reposantes intimités, parfois un peu poncives de cette grasse Normandie.

Cette Normandie aux verdures toujours neuves et lavées par les pluies, qu’un de ses conteurs énamourés, M. Barbey d’Aurevilly, a comparée à une jeune fille aux joues fraîches tout humides de larmes.

Je n’avais que douze ans, mais, liseur enragé de romans de chevalerie et le cerveau déjà farci de récits épiques et d’histoires fabuleuses, j’avais, dans mon imagination d’enfant, baptisé ce coin feuillu et solitaire du nom charmant de Broceliande.

Broceliande, la forêt des pommiers du pays de Bretagne, où l’astucieuse et svelte fée Viviane prit à son piège le vieux mage Myrdhinn, Broceliande où depuis cent ans le vieux barde oublié dort, enseveli dans l’herbe, son sommeil sorcier, exilé de la mort et rayé de la vie.

Les genêts étaient d’or, et dans Broceliande
L’iris bleu, ce joyau des sources, la lavande