Page:Loth - Mabinogion, tome 1.djvu/115

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« Voyez, » dit Riannon, « si son propre nom à lui ne lui irait pas mieux encore ». « Quel nom a-t-il ? » dit Pendaran Dyvet. « Nous lui avons donné le nom de Gwri Wallt Euryn[1]. » ― « Pryderi sera son nom, » dit Pendaran. « Rien de plus juste, » dit Pwyl, « que de lui donner le nom qu’a dit sa mère, lorsqu’elle a eu à son sujet joyeuse nouvelle. » On s’arrêta à cette idée.

« Teyrnon, » dit Pwyll, « Dieu te récompense, pour avoir élevé cet enfant jusqu’à cette heure ; il est juste aussi que lui-même, s’il est vraiment noble, te le rende. » ― « Seigneur, » répondit-il, « pas une femme au monde n’aura plus de chagrin après son fils que la femme qui l’a élevé n’en aura après lui. Il est juste qu’il ne nous oublie ni moi ni elle pour ce que nous avons fait pour lui. » ― « Par moi et Dieu, » répondit Pwyll, « tant que je vivrai, je te maintiendrai, toi et tes tiens, tant que je pourrai maintenir les miens à moi-même. Quand ce sera son tour, il aura encore plus de raisons que moi de te soutenir. Si c’est ton avis et celui de ces gentilshommes, comme tu l’as nourri jusqu’à présent, nous le donnerons désormais à élever à Pendaran Dyvet. Vous serez compagnons, et pour lui, tous les deux, pères nourriciers[2]. » ― « C’est une bonne idée, » dit chacun.

  1. Cf. p. 110. note.
  2. Nourrir ici indique une éducation complète. Comme chez les Irlandais (voy. O’Curry, On the manners and the customs of the ancient Irish, II, p. 355 et suiv.) ; chez les Gallois l’habitude était d’envoyer l’enfant hors de la famille, au sens étroit de ce mot. L’éducation dans un autre clan devenait souvent l’origine d’une véritable alliance du nourri avec ceux qui avaient été élevés avec lui ; les Mabinogion le montrent en maint endroit. Quelque chose de semblable a existé sur le continent. On appelait, en vieux français, nourri celui qui avait passé sa jeunesse dans la maison d’un parent, ami ou patron (Paulin Paris, Les Romans de la Table Ronde, IV, appendice).