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MADAME CHRYSANTÈME

jusqu’aux plus légères brumes errantes, ne laissant partout qu’un vide profond et clair. Et, après ces pluies, les couleurs vertes des bois, des montagnes, sont devenues d’une splendeur printanière, se sont rafraîchies — comme s’avivent d’un éclat mouillé les tons d’une peinture fraîchement lavée. Les sampans et les jonques, qui depuis trois jours s’étaient tenus blottis, s’en vont vers le large ; la baie est couverte de leurs voiles blanches ; on dirait la migration, l’essor d’une peuplade d’oiseaux de mer.


À huit heures, à la nuit, la manœuvre étant terminée, je m’embarque avec Yves dans un sampan ; c’est lui qui m’entraîne cette fois et veut me ramener dans mon logis.

À terre, une bonne odeur de foin mouillé. Un clair de lune admirable, dans les chemins de la montagne. Nous montons tout droit à Diou-djen-dji, retrouver Chrysanthème, que j’ai presque un remords, sans qu’il y paraisse, d’avoir abandonnée si longtemps.

En regardant en l’air, je reconnais de loin ma maisonnette, là-haut perchée. Elle est tout ou-