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MADAME CHRYSANTHÈME

l’encombrement, jusqu’à l’infini ; il en sortait des choses inattendues, inimaginables ; des paravents, des souliers, du savon, des lanternes ; des boutons de manchettes, des cigales en vie chantant dans des petites cages ; de la bijouterie, et des souris blanches apprivoisées sachant faire tourner des petits moulins en carton ; des photographies obscènes ; des soupes et des ragoûts, dans des écuelles, tout chauds, tout prêts à être servis par portions à l’équipage ; — et des porcelaines, des légions de potiches, de théières, de tasses, de petits pots et d’assiette… En un tour de main, tout cela, déballé, étalé par terre avec une prestesse prodigieuse et un certain art d’arrangement ; chaque vendeur accroupi à la singe, les mains touchant les pieds, derrière son bibelot — et toujours souriant, toujours cassé en deux par les plus gracieuses révérences. Et le pont du navire, sous ces amas de choses multicolores, ressemblant tout à coup à un immense bazar. Et les matelots, très amusés, très en gaieté, piétinant dans les tas, prenant le menton des marchandes, achetant de tout, semant à plaisir leurs piastres blanches…

Mais, mon Dieu, que tout ce monde était laid,