Page:Loti - Pêcheur d Islande.djvu/185

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hérité inconsciemment de cette couleur-là, posées sur ces planches si propres du navire, elles ressemblaient à des feuilles très fraîches tombées d’un arbre des tropiques.

Quelquefois on les réunissait toutes ; alors elles s’observaient entre elles, drôlement ; elles se mettaient à tourner le cou en tous sens, comme pour s’examiner sous différents aspects. Elles marchaient comme des boiteuses, avec des petits trémoussements comiques, partant tout d’un coup très vite, empressées, on ne sait pour quelle patrie ; et il y en avait qui tombaient.

Et puis les guenons apprenaient à faire des tours, et c’était un autre amusement. Il y en avait de tendrement aimées, qui étaient embrassées avec transport, et qui se pelotonnaient tout contre la poitrine dure de leurs maîtres en les regardant avec des yeux de femme, moitié grotesques, moitié touchantes.

Au coup de trois heures, les fourriers apportèrent sur le pont deux sacs de toile, scellés de gros cachets en cire rouge, et marqués au nom de Sylvestre ; c’était pour vendre à la criée, — comme le règlement l’exige pour les morts, — tous ses vêtements, tout ce qui lui avait appartenu au