Page:Loti - Pêcheur d Islande.djvu/19

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velouté frais, comme celui des fruits que personne n’a touchés.

On remplit de nouveau les verres, quand Yann fut assis, et on appela le mousse pour rebourrer les pipes et les allumer.

Cet allumage était une manière pour lui de fumer un peu. C’était un petit garçon robuste, à la figure ronde, un peu le cousin de tous ces marins qui étaient plus ou moins parents entre eux ; en dehors de son travail assez dur, il était l’enfant gâté du bord. Yann le fit boire dans son verre, et puis on l’envoya se coucher.

Après, on reprit la grande conversation des mariages :

— Et toi, Yann, demanda Sylvestre, quand est-ce ferons-nous tes noces ?

— Tu n’as pas honte, dit le capitaine, un homme si grand comme tu es, à vingt-sept ans, pas marié encore ! Les filles, qu’est-ce qu’elles doivent penser quand elles te voient !

Lui répondit, en secouant d’un geste très dédaigneux pour les femmes ses épaules effrayantes :

— Mes noces à moi, je les fais à la nuit ; d’autre fois, je les fais à l’heure ; c’est suivant.