Page:Loti - Pêcheur d Islande.djvu/209

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tinguait plus rien qu’une pâleur humide où se diffusait la lumière et où la mâture du navire semblait même se perdre.

— De ce coup, la voilà arrivée, la sale brume, dirent les hommes.

Ils connaissaient depuis longtemps cette inévitable compagne de la seconde période de pêche ; mais aussi cela annonçait la fin de la saison d’Islande, l’époque où l’on fait route pour revenir en Bretagne.

En fines gouttelettes brillantes, cela se déposait sur leur barbe ; cela faisait luire d’humidité leur peau brunie. Ceux qui se regardaient d’un bout à l’autre du bateau se voyaient troubles comme des fantômes ; par contre les objets très rapprochés apparaissaient plus crûment sous cette lumière fade et blanchâtre. On prenait garde de respirer la bouche ouverte ; une sensation de froid et de mouillé pénétrait les poitrines.

En même temps, la pêche allait de plus en plus vite, et on ne causait plus, tant les lignes donnaient ; à tout instant, on entendait tomber à bord des gros poissons, lancés sur les planches avec un bruit de fouet ; après, ils se trémoussaient rageu-