Page:Loti - Pêcheur d Islande.djvu/22

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embarrassé d’être devenu tout d’un coup si large et si grand. Il comptait se marier bientôt avec la sœur de Yann, mais jamais il n’avait répondu aux avances d’aucune fille.

À bord, ils ne possédaient en tout que trois couchettes, — une pour deux, — et ils y dormaient à tour de rôle, en se partageant la nuit.

Quand ils eurent fini leur fête, — célébrée en l’honneur de l’Assomption de la Vierge leur patronne, — il était un peu plus de minuit. Trois d’entre eux se coulèrent pour dormir dans les petites niches noires qui ressemblaient à des sépulcres, et les trois autres remontèrent sur le pont reprendre le grand travail interrompu de la pêche ; c’était Yann, Sylvestre, et un de leur pays appelé Guillaume.

Dehors il faisait jour, éternellement jour.

Mais c’était une lumière pâle, pâle, qui ne ressemblait à rien ; elle traînait sur les choses comme des reflets de soleil mort. Autour d’eux, tout de suite commençait un vide immense qui n’était d’aucune couleur, et en dehors des planches de leur navire, tout semblait diaphane, impalpable, chimérique.