Page:Loti - Pêcheur d Islande.djvu/352

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

petit portrait jauni de son Sylvestre accroché au granit du mur, avec ses ancres de marine et sa couronne funéraire en perles noires ; non, depuis que le métier de mer lui avait pris son petit-fils, à elle, elle n’y croyait plus, au retour des marins ; elle ne priait plus la Vierge que par crainte, du bout de ses pauvres vieilles lèvres, lui gardant une mauvaise rancune dans le cœur.

Mais Gaud écoutait avidement ces choses consolantes, ses grands yeux cernés regardaient avec une tendresse profonde ce vieillard qui ressemblait au bien-aimé ; rien que de l’avoir là, près d’elle, c’était une protection contre la mort, et elle se sentait plus rassurée, plus rapprochée de son Yann. Ses larmes tombaient, silencieuses et plus douces, et elle redisait en elle-même ses prières ardentes à la Vierge Étoile-de-la-Mer.

Une relâche là-bas, dans ces îles, pour des avaries peut-être ; c’était une chose possible en effet. Elle se leva, lissa ses cheveux, fit une sorte de toilette, comme s’il pouvait revenir. Sans doute tout n’était pas perdu, puisqu’il ne désespérait pas, lui, son père. Et, pendant quelques jours, elle se remit encore à attendre.