Page:Louÿs - Œuvres complètes, éd. Slatkine Reprints, 1929 - 1931, tome 10.djvu/92

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égale à son immense labeur et sa devise lui mentit, mais non pas ses armoiries. Il a vécu au milieu de nous comme un sage qui s’est résigné à considérer sans se plaindre le croissant noir de son destin ;


PAUL FORT

Voici le frère de Jules Laforgue : un grand poète, un écrivain dont chaque ligne émeut, à la fois parce qu’elle est belle et parce qu’elle est profondément vraie, sincère et douée de vie.

Avant de s’imposer à l’admiration de tous par ce livre des Ballades dont je parlerai plus loin, M. Paul Fort avait fait connaître son nom par une œuvre dont la génération actuelle ne saurait lui témoigner assez de reconnaissance et qui fut le Théâtre d’Art. Presque seul, sans ressources, sans appuis, il eut à dix-huit ans l’ambition charmante d’attaquer, dans une lutte qui fut, depuis, victorieuse, le Théâtre Libre où s’efforçait la génération naturaliste. Il enrôla des acteurs sans gages ; il fit brosser des décors nouveaux par des peintres à qui la manière d’Amable et de Carpezat n’apparaissait pas comme un art suprême ; il reçut des pièces inédites et injouables, qu’il joua néanmoins ; il eut des auteurs et même un public qu’il attira tour à tour au Marais, à Montparnasse, à Montmartre, au Vaudeville ; il eut, le premier,