Page:Louÿs - Œuvres complètes, éd. Slatkine Reprints, 1929 - 1931, tome 3.djvu/20

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III


Lêda espérait qu’aux prochaines étoiles montantes le Cygne reviendrait vers elle, et elle l’attendit dans les roseaux du fleuve, près de l’œuf bleu qui était né de leur union miraculeuse.

L’Eurotas était peuplé de cygnes, mais celui-là n’y était plus. Elle l’aurait reconnu entre mille, et même en fermant les yeux elle l’aurait senti s’approcher. Mais il n’y était plus, elle en était bien sûre.

Alors elle ôta sa couronne de feuilles d’eau, la laissa choir dans le courant, et défit sa chevelure bleue et y pleura.

Quand elle essuya ses yeux et regarda, un satyre était là, qu’elle n’avait pas entendu marcher.

Car elle n’était plus semblable à Phœbé. Elle avait perdu sa virginité. Les satyres n’auraient plus peur d’elle.

D’un bond, elle fut sur ses pieds et recula effarouchée.