Page:Louÿs - Œuvres complètes, éd. Slatkine Reprints, 1929 - 1931, tome 3.djvu/37

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Et voici : soudain elles aperçurent Ariane.

Alors elles se précipitèrent, elles lui prirent les bras et les jambes, elles tordirent ses cheveux désolés ; la première saisit la tête, et pesant du pied sur l’épaule, l’arracha comme une fleur lourde ; et les autres écartelaient les membres, et la sixième déchirant le ventre, en tira la matrice petite, et la septième, fonçant la poitrine, déracina le cœur vomissant.

Le Dieu, le Dieu parut !

Elles se ruèrent sur lui, brandirent leurs trophées…

Il était nu, couronné de pampre. Une peau de faon pendait sur ses reins. Il tenait une coupe de buis.

Il dit :

« Laissez ces pauvres membres. »

Les Bakkhantes les jetèrent sur le sol, et, chassées par un geste, s’enfuirent brusquement dans la montagne, comme un troupeau piqué des taons.

Alors, il pencha sa coupe creuse qui ruissela merveilleusement ; et les membres se réunirent, et le cœur revécut tout à coup, et Ariane égarée se souleva sur la main.

« Ô Dionysos ! », dit-elle.


La nuit claire et sombre était dans la mer.

Le Dieu tendit les doigts en avant et parla, d’une voix grave et tendre.