Page:Louÿs - Œuvres complètes, éd. Slatkine Reprints, 1929 - 1931, tome 3.djvu/47

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I


Au delà de Thèbes et de Hermontis, au delà de Silsilis et d’Ombos, Biôn avait remonté le Nil. Même il avait passé l’île Éléphantine, où finit la terre d’Aegypte, et il s’avançait vers la noire Aethiopie, qui est proche des bornes du monde.

Il n’avait pas de barque pour vaincre le cours lent du fleuve, car il eût fallu des esclaves pour manœuvrer les avirons, et il avait craint de s’imposer des compagnons sans intérêt. Aussi voyageait-il à pied, le long des rives molles et herbues, si étroites, que la route longeait parfois le pied des falaises multicolores, où commençait exactement l’infini montueux du Désert.

Cette mince bande de terre vivante entre deux mornes solitudes, cette voie de champs d’or et d’herbes splendides, fendue jusqu’aux deux horizons par la lumière verte du Nil, retentissait de cris d’oiseaux, stridents et pressés, dans l’air, sur