Page:Louÿs - Œuvres complètes, éd. Slatkine Reprints, 1929 - 1931, tome 3.djvu/68

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rire et de jouer. À présent, tout est bien changé. Je n’ai plus besoin des jeux, mère, et si je ne ris plus, c’est que je suis heureux. »

Et Cyanée lui demanda :

« Pourquoi es-tu heureux ? »

Et Caunos répondit :

« Je regarde Byblis. »

Et Cyanée lui demanda encore :

« Pourquoi ne regardes-tu plus la forêt ?

— Parce que les cheveux de Byblis sont plus doux que les herbes et plus chargés de parfum ; parce que les yeux de Byblis… »

Mais Cyanée l’arrêta :

« Enfant ! Tais-toi ! »

Et, espérant le guérir de sa passion défendue, elle le conduisit aussitôt chez une nymphe de la montagne, laquelle avait sept filles d’une beauté plus merveilleuse que les mots ne le sauraient dire :

Et toutes deux lui parlèrent, s’étant concertées :

« Choisis. Celle qui te plaira, Caunos, sera ta femme. »

Mais Caunos regarda les sept jeunes filles d’un œil aussi indifférent que s’il eût vu sept rochers, car l’image de Byblis seule emplissait toute sa petite âme, et il n’y avait pas de place en lui pour une tendresse étrangère.

Pendant un mois Cyanée ainsi conduisit son fils de montagne en montagne et de plaine en plaine, mais sans réussir une fois à le détourner de son désir.