Page:Louÿs - Œuvres complètes, éd. Slatkine Reprints, 1929 - 1931, tome 4.djvu/111

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premier mois où je verrai mon sang couler je me croirai déjà près de la mort. Laisse-moi te faire un baiser. Je t’aime bien. »

Ici la conversation prit une tournure moins posée, sinon plus silencieuse, et Démétrios s’aperçut vite que ses scrupules n’étaient pas de mise auprès d’une petite personne déjà si bien renseignée. Elle semblait se rendre compte qu’elle n’était qu’une pâture un peu maigre pour un appétit de jeune homme, et elle déroutait son amant par une prodigieuse activité d’attouchements furtifs, qu’il ne pouvait ni prévoir, ni permettre, ni diriger, et qui ne lui laissaient jamais le repos d’une étreinte aimante. Le petit corps agile et ferme se multipliait autour de lui, s’offrait et se refusait, glissait, tournait, luttait. À la fin ils se saisirent. Mais cette demi-heure ne fut qu’un long jeu.

Elle sauta du lit la première, trempa son doigt dans la coupe de miel et s’en barbouilla les lèvres ; puis, avec mille efforts pour ne pas rire, elle se pencha sur Démétrios en frottant sa bouche sur la sienne. Ses boucles rondes dansaient de chaque côté de leurs joues. Le jeune homme sourit et s’accouda :

« Comment t’appelles-tu ? dit-il.

— Melitta. Tu n’avais pas vu mon nom sur la porte ?

— Je n’avais pas regardé.