Page:Louÿs - Œuvres complètes, éd. Slatkine Reprints, 1929 - 1931, tome 4.djvu/192

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par le vin de Bacchis, elle fuyait ainsi, tournait de droite à gauche, toute pâle, égarée.

Enfin un mur lui barra la route : elle était dans une impasse. À la hâte elle voulut retourner en arrière, mais deux matelots aux mains brunes lui barrèrent l’étroit passage.

« Où vas-tu, fléchette d’or ? dit l’un d’eux en riant.

— Laissez-moi passer !

— Hein ? tu es perdue, jeune fille, tu ne connais pas bien Rhacotis, dis donc ? Nous allons te montrer la ville. »

Et ils la prirent tous les deux par la ceinture. Elle cria, se débattit, lança un coup de poing, mais le second matelot lui saisit les deux mains à la fois dans sa main gauche et dit seulement :

« Tiens-toi tranquille. Tu sais qu’on n’aime pas les Grecs ici ; personne ne viendra t’aider.

— Je ne suis pas Grecque !

— Tu mens, tu as la peau blanche et le nez droit. Laisse-toi faire si tu crains le bâton. »

Chrysis regarda celui qui parlait, et soudain lui sauta au cou.

« Je t’aime, toi, je te suivrai, dit-elle.

— Tu nous suivras tous les deux. Mon ami en aura sa part. Marche avec nous ; tu ne t’ennuieras pas. »


Où la conduisaient-ils ? Elle n’en savait rien