Page:Louÿs - Œuvres complètes, éd. Slatkine Reprints, 1929 - 1931, tome 4.djvu/248

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— Oh ! je sais que tu ne te débauches pas !

— Pour tacher ma robe et recevoir des coups, non, Philotis. Il n’y a que les femmes riches qui puissent faire l’orgie. Les petites joueuses de flûte n’y gagnent que des larmes.

— Quand on ne veut pas tacher sa robe, on la laisse dans l’antichambre. Quand on reçoit des coups de poing, on se fait payer double. C’est élémentaire. Ainsi tu n’as rien à nous apprendre ? Pas une aventure, pas une plaisanterie, pas un scandale ? Nous bâillons comme des ibis. Invente quelque chose si tu ne sais rien.

— Mon amie Théano est restée après moi. Quand je me suis réveillée, tout à l’heure, elle n’était pas encore rentrée. La fête dure peut-être toujours.

— C’est fini, dit une autre femme. Théano est là-bas, contre le mur Céramique. »


Les courtisanes y coururent, mais à quelques pas elles s’arrêtèrent avec un sourire de pitié.

Théano, dans le vertige de l’ivresse la plus ingénue, tirait avec obstination une rose presque défleurie dont les épines s’accrochaient à ses cheveux. Sa tunique jaune était souillée de rouge et de blanc comme si toute l’orgie avait passé sur elle. L’agrafe de bronze qui retenait sur l’épaule gauche les plis convergents de l’étoffe pendait plus bas que la ceinture et découvrait