Page:Louÿs - Œuvres complètes, éd. Slatkine Reprints, 1929 - 1931, tome 4.djvu/265

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que les premiers étaient rares. Ce serait contre les usages. Mais je peux te demander d’en recevoir, n’est-ce pas ?

— Assurément, dit Chrysis joyeuse.

— Ce miroir, ce peigne, ce collier, que tu m’as fait prendre pour toi, tu n’espérais pas en user, n’est-ce pas ? Un miroir volé, le peigne d’une victime et le collier de la déesse, ce ne sont pas là des bijoux dont on puisse faire étalage.

— Quelle idée !

— Non. Je le pensais bien. C’est donc par pure cruauté que tu m’as poussé à les ravir au prix de trois crimes dont la ville entière est bouleversée aujourd’hui ? Eh bien, tu vas les porter.

— Quoi !

— Tu vas aller dans le petit jardin clos où se trouve la statue d’Hermès Stygien. Cet endroit est toujours désert et tu ne risques pas d’y être troublée. Tu enlèveras le talon gauche du dieu. La pierre est brisée, tu verras. Là, dans l’intérieur du socle tu trouveras le miroir de Bacchis et tu le prendras à la main ; tu trouveras le grand peigne de Nitaoucrît et tu l’enfonceras dans tes cheveux ; tu trouveras les sept colliers de perles de la déesse Aphrodite, et tu les mettras à ton cou. Ainsi parée, belle Chrysis, tu t’en iras par la ville. La foule va te livrer aux soldats de la reine ; mais tu auras ce que tu souhaitais et j’irai te voir dans ta prison avant le lever du soleil. »