Page:Louÿs - Œuvres complètes, éd. Slatkine Reprints, 1929 - 1931, tome 5.djvu/118

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— Tu n’as donc peur de rien, Concha ? Tu n’as pas peur de mourir ?

— Non ! et d’abord ce n’est pas vous qui me tuerez.

— Tu m’en défies ?

— Ici même, et où vous voudrez. Je vous connais, don Mateo, comme si je vous avais porté neuf mois. Vous ne toucherez jamais à un cheveu de ma tête, et vous avez raison, car je ne vous aime plus.

— Tu oses dire que tu m’as aimé ?

— Croyez ce qu’il vous plaira. Vous êtes seul coupable.

C’était elle qui me faisait des reproches. J’aurais dû m’attendre à cette comédie.


— Deux fois, repris-je, deux fois tu m’as fait cela ! Ce que je te donnais du fond de mon cœur, tu l’as reçu comme une voleuse, et tu es partie, sans un mot, sans une lettre, sans même avoir chargé personne de me porter ton adieu. Qu’ai-je fait pour que tu me traites ainsi ?

Et je répétais entre mes dents :

« Misérable ! Misérable ! »

Mais elle avait son excuse :

— Ce que vous avez fait ? Vous m’avez trompée. N’aviez-vous pas juré que j’étais en sûreté dans vos bras et que vous me laisseriez choisir la nuit et l’heure de mon péché ? La dernière fois, ne vous