Page:Louÿs - Œuvres complètes, éd. Slatkine Reprints, 1929 - 1931, tome 7.djvu/104

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mon âme et se cultive mon esprit ! Faut-il avoir renoncé même aux félicités du mariage pour se voir à la fin souillée moralement, salie : par un Français que je ne connais même point, traînée sous mon propre nom dans la boue du ruisseau de Paris… Ah ! mon Dieu ! quel malheur sur moi !

« Que faire ? que faire à présent ? Comment serai-je reçue par ce romancier si j’ose me présenter à lui ? Sais-je seulement si je serai respectée chez un homme assez débauché pour écrire ces infamies ? Et puis, qui me dit que tout cela n’est pas une vengeance, une machination ourdie contre moi ? J’ai des ennemis dans la ville, bien que je n’aie fait de mal à personne. Certains en veulent à ma famille, d’autres à ma fortune, d’autres à mon savoir. Et puis… et puis… le mal est fait… »


II


Paris, 12 avril.

« Je suis venue. En vérité, je ne sais pas ce que je fais ici, mais je suis venue… Mina le voulait pour mon honneur. Elle m’a dit qu’il était encore temps d’agir pour éviter un mal plus grave… Si du moins elle m’accompagnait, si je pouvais faire avec elle cette visite qui m’épouvante… Mais je suis seule ici dans cette ville, où mon nom, depuis six mois, est un nom infâme… »