Page:Louÿs - Œuvres complètes, éd. Slatkine Reprints, 1929 - 1931, tome 7.djvu/46

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comprendre l’admiration que tout le peuple grec vouait à son grand nom.

Le panneau commencé reposait obliquement sur un chevalet de bois de sycomore dont les deux montants, prêts à se rejoindre, se recourbaient en cols de cygnes d’or. Je me penchai respectueusement et vis un singulier sujet qui, pourtant, ne me surprit point dans l’atelier de Parrhasios. Son tableau représentait un paysage sylvestre et frais à voir, où s’allongeait sur le côté une nymphe endormie, ses flèches à la main. Un satyre, penché devant elle, lui soulevait la tunique jusqu’à la ceinture avec une expression de gourmandise bestiale. Derrière, un deuxième satyre à genoux assaillait la vierge directement, sans troubler son jeune sommeil qui devait être bien profond. C’était tout.

Mais comme je relevais les yeux, j’aperçus à quelques pas, étendue sur une banquette, la confuse Artémidora entre les deux barbares Sarmates qui venaient de poser avec elle le mouvement de cette rouge esquisse.

Et Parrhasios m’expliqua :

— Oui. J’aime ces tableaux de vie intense, et je ne montre le Désir de l’Homme qu’à l’instant de son paroxysme et de sa réalisation. Socrate, qui avait commencé par être un mauvais sculpteur avant de devenir un bon philosophe, voulait me voir peindre l’amour avec des regards et des