Page:Louÿs - La Femme et le Pantin, 1916.djvu/122

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soupçon de plus aurait pu me mettre en garde, auquel je ne m’arrêtai point : je veux dire l’absence de mystères et de contrainte à mon égard. Il n’y avait jamais d’instant où je ne pusse entrer dans leur chambres. Concha, toujours affectueuse, mais toujours réservée, ne faisait aucune difficulté pour me rendre témoin même de sa toilette. Souvent, je la trouvais couchée le matin, car elle se levait tard depuis qu’elle était oisive. Sa mère sortait, et elle, ramenant ses jambes dans le lit, m’invitait à m’asseoir près de ses genoux réunis.

Nous causions. Elle était impénétrable.

J’ai vu à Tanger des Mauresques en costume, qui entre leurs deux voiles ne laissaient nus que leurs yeux, mais par là, je voyais jusqu’au fond de leur âme. Celle-ci ne cachait rien, ni sa vie ni ses formes, et je sentais un mur entre elle et moi.

Elle paraissait m’aimer. Peut-être m’aimait-elle. Aujourd’hui encore, je ne sais que penser. À toutes mes supplications, elle répondait par