Page:Louÿs - Les aventures du roi Pausole, 1901.djvu/348

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

les maisons, les trottoirs, les pavés et le ciel lui-même. Depuis les portes de la cité jusqu’à la Grand’Place, dix-huit cents jeunes filles nues formaient une haie brune et versaient un fleuve de roses rouges sur les pas du Roi et des Reines. Les innombrables fleurs de juin tombaient des fenêtres dans les rues comme des cascades au torrent.


Pausole saluait, saluait, ouvrait les bras, penchait la tête, levait parfois une main qui semblait dire : « C’est trop ! » Et sa bonne barbe et ses bons yeux rendaient par leur expression douce à l’enthousiasme de la foule une affection toute paternelle qui enchantait les assistants.

Philis, auprès de lui, se tenait très raide, consciente de ses nouveaux droits et de la part qu’elle pouvait prendre aux acclamations publiques. Son regard était sévère et digne ; mais pour se mettre dans le ton des modes qu’elle voyait générales elle avait enlevé l’épingle qui arrêtait à mi-buste l’ouverture de son corsage, et elle montrait au peuple ses seins élevés à l’ombre, étant fière de leurs pointes pâles et de leur peau transparente.

Taxis cherchait dans sa Bible de saines distractions à un tel spectacle ; mais le hasard l’ayant fait tomber sur le second livre des Chroniques, il ne