merveilles des laures de la Thébaïde se renouveler sous le ciel de la Bourgogne[1].
Il paraît que le Tonnerrois, un des douze pagi qui formaient la province lingone sous les Romains, était plus à l’abri que des incursions barbaresques, surtout dans sa partie située entre le Serein et l’Armançon[2]. Ce fut dans cette contrée, alors paisible, que les premiers ascètes langrois se réfugièrent, comme dans une anse hospitalière, loin du bruit et de l’orage. Là où avait fini le monde païen, là commença le monde monastique.
Aussitôt que le catholicisme a arraché un peuple à la barbarie, il le confie à la garde des moines pour qu’il se dépouille de son âpre écorce et achève sa transformation sous l’influence religieuse et civilisatrice du froc. Or les Bourguignons, quoique convertis dès l’an 414, et devenus par cela même les plus doux des barbares, n’en avaient pas moins conservé la plupart de leurs habitudes grossières : c’étaient encore, à la fin du ve siècle, du temps de saint Sidoine Apollinaire, des géants de sept pieds (Burgundio septipes), couverts de peaux et de larges braies, armés de massues et de framées, adonnés à l’ivrognerie, hurlant des chants sauvages, les cheveux graissés avec du beurre acide, exhalant l’odeur empestée de l’ail et de l’oignon, etc.[3]. Ce fut au sein de cette horde, sur le front de laquelle
- ↑ Gall. christ., t. 4, p. 658 ; Reomaus, seu Hist. S. Joannis Reom., 1637, in-4o.
- ↑ Voir sur ces douze pagi le P. Jacques Vignier, Décade historique, Ms. ; — les Recueils de M. Mathieu, t. 1, Ms. ; — Migneret, Précis de l’Histoire de Langres, p. 26 ; enfin, les Pièces justificatives de cet ouvrage. On nous reprochera peut-être de ne pas signaler l’abbaye de St-Étienne. Sans doute, la crypte de St-Étienne est le plus ancien monument chrétien de Dijon ; mais les fidèles ayant élevé un oratoire sur cette crypte vers l’an 343, les évêques de Langres envoyèrent des clercs de leur église pour y remplir les fonctions du ministère pastoral ; ces clercs, vivant ensemble formaient une communauté ecclésiastique et non une communauté monastique. — Fyot, Hist. de l’Egl. abb. et collég. de St-Estienne, p. 21, in-fol.
- ↑ Apoll., carm. 12.