Page:Louis Napoléon Bonaparte - Histoire de Jules César, tome 1, Plon 1865.djvu/344

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

consul, fort de cet exemple et d’un décret du sénat, tire une fois le glaive, qui l’arrêtera, qui le modérera ?

Nos ancêtres, Pères conscrits, ne manquèrent jamais de prudence ni de décision, et l’orgueil ne s’opposait point à ce qu’ils adoptassent les usages étrangers, quand ils leur paraissaient bons. Aux Samnites ils empruntèrent leurs armes offensives et défensives ; aux Étrusques, la plupart des insignes de nos magistrats ; enfin tout ce qui, chez leurs alliés ou leurs ennemis, leur paraissait utile, ils mettaient une ardeur extrême à se l’approprier, aimant mieux imiter les bons exemples que d’en être jaloux. À la même époque, adoptant un usage de la Grèce, ils infligèrent les verges aux citoyens et le dernier supplice aux condamnés. Plus tard la République s’agrandit ; l’agglomération des citoyens donna aux factions plus d’importance, l’innocent fut opprimé ; on se porta à bien des excès de ce genre. Alors la loi Porcia et beaucoup d’autres lois furent promulguées, qui n’autorisent que l’exil contre les condamnés. Cette considération, Pères conscrits, est, à mon avis, la plus forte pour faire rejeter l’innovation proposée. Certes ils nous étaient supérieurs en vertu et en sagesse ces hommes qui, avec de si faibles moyens, ont élevé un si grand empire, tandis que nous conservons à peine un héritage si glorieusement acquis. Faut-il donc mettre en liberté les coupables, et en grossir l’armée de Catilina ? Nullement ; mais je vote pour que leurs biens soient confisqués, eux-mêmes emprisonnés dans les municipes les mieux pourvus de force armée, afin qu’on ne puisse jamais, par la suite, proposer leur réhabilitation, soit au sénat, soit au peuple ; que quiconque contreviendra à cette mesure soit déclaré par le sénat ennemi de l’État et du repos public[1]. »

  1. Salluste, Catilina, li. — Appien, Guerres civiles, II, vi.