Page:Louis Napoléon Bonaparte - Histoire de Jules César, tome 1, Plon 1865.djvu/354

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comme une contagion, avait infecté l’âme de la plupart des citoyens. » Ce qui prouve que Catilina, quoique sans scrupules et sans principes, avait cependant la conscience de défendre une cause qu’il voulait ennoblir, c’est que, loin d’appeler les esclaves à la liberté, comme l’avaient fait Sylla, Marius et Cinna, exemple séduisant pour un conspirateur, il refusa de s’en servir[1], malgré les conseils de Lentulus, qui lui faisait dire ces mots significatifs : « Déclaré ennemi de Rome, dans quel but Catilina refuserait-il les esclaves[2] ? » Enfin, ce qui prouve que, parmi ces révoltés qu’on nous présente comme un ramassis de bandits, prêts à se disperser sans résistance[3], il existait cependant une foi ardente et un véritable fanatisme, c’est l’héroïsme de la lutte suprême. Les deux armées se rencontrent dans la plaine de Pistoïa le 5 janvier 692 ; un combat terrible s’engage, et, l’espoir de vaincre perdu, aucun des soldats de Catilina ne recule. Tous, à l’exemple de leur chef, se font tuer, les armes à la main ; tous sont retrouvés sans vie, mais à leurs rangs, groupés autour de l’aigle de Marius, relique glorieuse de la guerre contre les Cimbres, insigne vénéré de la cause populaire[4].

Certes Catilina était coupable de tenter le renversement des lois de son pays par la violence ; mais il ne faisait que suivre les exemples de Marius et de Sylla. Il rêvait une dictature révolutionnaire, la ruine du parti oligarchique, et,

  1. « En attendant, il refusait des esclaves qui, dès le commencement, n’avaient cessé de venir le joindre par troupes nombreuses. Plein de confiance dans les ressources de la conjuration, il regardait comme contraire à sa politique de paraître rendre la cause des citoyens commune à celle des esclaves. » (Salluste, Catilina, lvi.)
  2. Salluste, Catilina, xliv.
  3. « Gens qui tomberont à nos pieds, si je leur montre, je ne dis pas la pointe de nos armes, mais l’édit du préteur. » (Cicéron, Deuxième Catilinaire, iii.)
  4. Salluste, Catilina, lxi.