Page:Louis Napoléon Bonaparte - Histoire de Jules César, tome 1, Plon 1865.djvu/356

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avec la fierté d’un vainqueur, n’en reçut qu’une froide réponse[1], et vit bientôt s’accomplir les paroles prophétiques de César : « On oublie les fautes des plus grands criminels, pour ne se souvenir que du châtiment, s’il a été trop sévère[2]. »

Avant même la bataille de Pistoïa, quand les poursuites contre les partisans de Catilina se continuaient encore, le sentiment général était déjà hostile à celui qui les avait provoquées, et Metellus Nepos, envoyé récemment d’Asie par Pompée, blâmait ouvertement la conduite de Cicéron. Lorsqu’au sortir de ses fonctions celui-ci voulut haranguer le peuple, afin de glorifier son consulat, Metellus, nommé tribun, lui ferma la bouche en s’écriant : « L’homme qui n’a pas permis aux accusés de se défendre ne se défendra pas lui-même. » Et il lui ordonna de se borner au serment d’usage, qu’il n’avait rien fait de contraire aux lois. « Je jure, repartit Cicéron, que j’ai sauvé la République. » Cette exclamation orgueilleuse a beau être applaudie par Caton et les assistants, qui le saluent du nom de Père de la patrie, cet enthousiasme n’aura qu’une durée éphémère[3].


    du peuple, aux tribunaux, qu’il n’eût sans cesse à la bouche les noms de Catilina et de Lentulus. » (Plutarque, Cicéron, xxxi.)

  1. Cicéron, Lettres familières, V, vii ; Lettre à Pompée.
  2. Voy. le Discours de César cité plus haut.
  3. Il n’est pas sans intérêt de reproduire ici, d’après les lettres de Cicéron, la liste des discours qu’il a prononcés pendant l’année de son consulat : « J’ai voulu, moi aussi, avoir (comme Démosthène) mes harangues politiques, qu’on peut nommer consulaires. La première et la seconde sont sur la loi agraire : l’une, dans le sénat, aux calendes de janvier ; l’autre, devant le peuple ; la troisième, sur Othon ; la quatrième, pour Rabirius ; la cinquième, sur les enfants des proscrits ; la sixième, sur mon désistement de ma province ; la septième est celle qui a chassé Catilina ; la huitième a été prononcée devant le peuple le lendemain de sa fuite ; la neuvième, à la tribune, le jour où les Allobroges sont venus déposer ; la dixième, au sénat, le 5 décembre. Il y en a encore deux, moins longues, qui sont comme des annexes des deux premières sur la loi agraire. » (Cicéron, Lettres à Atticus, II, i.)