Page:Louis Napoléon Bonaparte - Histoire de Jules César, tome 1, Plon 1865.djvu/359

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à rendre la justice ; mais, averti qu’on voulait employer contre lui des mesures coercitives, il se démit volontairement de sa charge et se renferma dans sa maison.

Cependant cet outrage aux lois ne fut pas pris avec indifférence. Deux jours après un attroupement se forma devant la demeure de César ; on le pressait à grands cris de ressaisir sa dignité ; il engagea la foule à rester dans le devoir. Le sénat, qui s’était réuni au bruit de cette émeute, le fit appeler, le remercia de son respect pour les lois, et le réintégra dans la préture.

Ainsi César se tenait dans la légalité et obligeait le sénat d’en sortir. Ce corps, jadis si ferme, mais si modéré, ne reculait plus devant des coups d’autorité : en même temps un tribun et un préteur étaient contraints de se dérober à ses actes arbitraires. C’étaient, depuis les Gracques, les mêmes scènes de violence, tantôt de la part des grands, tantôt de la part du peuple.

La justice que la crainte d’un mouvement populaire venait de faire rendre à César n’avait pas découragé la haine de ses ennemis. Ils tentèrent de renouveler contre lui l’accusation de complicité dans la conspiration de Catilina. À leur instigation, Vettius, employé autrefois par Cicéron, comme espion, à la découverte du complot, le cita devant le questeur Novius Niger[1], et Curius, auquel des récompenses publiques avaient été décernées, l’accusa devant le sénat. Tous deux attestaient son affiliation aux conjurés, prétendant tenir ce fait de la bouche même de Catilina. César se défendit sans peine et invoqua le témoignage de Cicéron, qui n’hésita pas à le disculper. La séance néanmoins s’étant prolongée, le bruit de l’accusation se répandit dans la ville ; la foule, inquiète du sort de César, vint en masse le redemander ; elle se montrait si irritée, que, pour

  1. Cicéron, Lettres à Atticus, II, xxiv.