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L’ÉVASION DE KINKIN


Maintenant qu’il avait dépassé la zone et franchi les lignes de rebat, Kinkin marchait plus librement, respirant à longs traits, rêvassait même un peu.

Tout à l’heure, en remontant la Réverotte pour passer au gué du Moulin Neuf, n’avait-il point remarqué une superbe truite qui se calait sous un rocher de la rive.

Son coup d’œil l’avait soupesée : deux ou trois livres au moins, fameux morceau qu’il pourrait vendre facilement chez l’un ou l’autre de ses clients, fines gueules et gros bonnets du chef-lieu de canton. La question se posait seulement de savoir s’il la prendrait au filet ou à la main.

Car Kinkin savait conduire de front plusieurs affaires et les menait jusqu’au bout presque toujours avec succès.

Et s’il n’avait point fait fortune à exercer certains métiers plutôt décriés : contrebande, maraude et braconnages divers, il avait assez de philosophie innée ou acquise pour n’en point accuser le