Page:Louis Pergaud - Les Rustiques nouvelles villageoises, 1921.djvu/123

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pays, on les désignait généralement, le premier sous le nom de gros Zidore, le second sous celui de gros Léon, appellations qui leur seyaient d’autant mieux qu’ils avaient conquis, comme il convenait à leur âge et à leur position sociale, la pointe de bedon qui confère toute son importance au campagnard cossu.

Tous deux aimaient à boire et étaient grands amis. Le gros Zidore faisait de la culture ; le gros Léon, qui avait épousé une femme riche, ne faisait rien, ses trois mille francs de rente lui permettant l’oisiveté. Il charmait les heures en se promenant, en chassant et en buvant. À ce petit commerce-là, il se ruinait lentement, tandis que son ami, plus roublard, s’enrichissait encore ; il est juste d’ajouter que si Zidore aimait à boire ainsi que Léon, c’était surtout aux frais de ce dernier et qu’il avait, pour arriver au but, diverses cordes à son arc qu’il savait utiliser, au mieux des jours et des circonstances, avec une très grande sûreté de main.

Comme ils étaient en ce temps-là les deux seuls fusils de la commune, dès qu’un paysan avait repéré les lieux et heures de sortie d’un lièvre, dès qu’il pouvait indiquer, à cinquante mètres près, l’endroit où l’oreillard rentrait en forêt, son canton de remise et, souvent même, son gîte, il s’en venait annoncer la chose à l’un ou l’autre des deux compères, en lui disant :