Page:Louis Pergaud - Les Rustiques nouvelles villageoises, 1921.djvu/140

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À la suite d’une affaire dans laquelle le village tout entier avait failli, par la faute de sa langue, en venir aux mains, un homme énergique parmi les anciens de la commune avait réuni quelques-uns de ses camarades et là, après avoir décidé son propriétaire à le flanquer à la porte, on avait avisé aux moyens de l’empêcher de retrouver coûte que coûte dans la région un nouveau logis.

Il s’en irait semer la discorde et la zizanie ailleurs, où il voudrait, pourvu que le pays fût débarrassé de sa personne.

Et voilà pourquoi, depuis deux mois, malgré de savantes entrées en matière et d’insidieux discours, Cacaine ne trouvait personne qui consentît à lui louer, même en payant d’avance et à un taux certes fort élevé pour le canton, la chambre qu’il sollicitait.

Après les premiers refus, il avait souri, hautain et méprisant ; mais à présent qu’il soupçonnait l’entente secrète et flairait la conspiration, il ne décolérait plus.

— Ah, tas de cochons, salauds ! grognait-il en remontant chez lui, bougres de canailles ! ah, vous voulez que je fiche le camp d’ici ? eh bien, non ! je ne m’en irai pas et, bon gré mal gré, vous me logerez, oui, vous me logerez : je le jure sur les tripes de mon père !

À dater de ce jour, Cacaine ne travailla plus