Page:Louis Pergaud - Les Rustiques nouvelles villageoises, 1921.djvu/172

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

mésanges pouvaient bâtir en paix, pondre, couver et faire éclore sans hâte avec nous ; c’était dans le grand que nous donnions et par les bois que se perpétraient nos rapts et nos meurtres.

Nous traquions les jeunes merles pour leur apprendre à siffler, les geais pour leur apprendre à parler, les corbeaux pour leur apprendre à se saouler, les pies pour leur apprendre à chaparder et les grives pour rien, pour l’égalité devant le malheur sans doute.

Or la tactique et les règles de notre association étaient les suivantes :

Nous entrions en forêt à un endroit déterminé et, à nous six, nous battions en tous sens un espace donné, habituellement le grand rectangle compris entre une tranchée sommière et deux tranchées transversales, plus ou moins selon le bois et temps dont nous disposions.

Dès que l’un des traqueurs apercevait un nid, il l’annonçait aux autres en criant de tous ses poumons : Preu ! Immédiatement on entendait : seu ! puis trois ! quat’ ! cinq ! et enfin, comme un grognement grave, der !

Ces diverses exclamations affirmaient que le preu ou premier, celui qui avait trouvé le nid, avait le droit de choisir parmi les oisillons celui qui lui semblerait le plus beau ; le seu ou second venait immédiatement après, puis le troisième et ainsi de suite.