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de leurs convictions, à lui répondre par l’une ou l’autre de ces phrases sacramentelles et lapidaires :

— Tu sais bien que je suis du bon côté !

Ou encore :

— On a toujours fait pour le bien ! leur psychologie du racoleur leur ayant depuis longtemps appris que celui-ci interprétait toujours le « bon côté » et le « bien » comme étant sa façon de voir à lui et d’agir.

Or, le matin, jour de l’élection, Laugu du Moulin et Abel le Rat, après un petit somme pour cuver les cuites de la semaine, s’étant levés et de concert, mais en grand mystère, avaient préparé leurs billets qu’ils avaient soigneusement répartis dans leurs poches de gilet ; puis, la chose réglée, étaient partis faire leur « tournée ».

Conformément aux principes et à l’expérience acquise, ils ne votaient qu’à la dernière minute, profitant jusqu’au bout des offres libatoires des champions des deux clans.

Et comme, ce jour-là, il fallait donner des gages plus précis d’attachement aux partis, ils exhibaient aux Blancs, de la poche droite de leur gilet, un billet conforme à l’opinion blanche, et chez les Rouges, de la poche gauche, un billet portant tous les noms de la liste rouge.

Quand, vers midi, le vin ayant un peu échauffé les esprits, les politiciens sérieux s’étonnaient avec