Page:Lumet - La Vie d’un, 1897.djvu/93

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lente il feignait d’attendre un ami, près des rouleaux de papier. Il dévisageait les camelots d’un air entendu et il se mêlait à la foule, maugréant : « Ce sacré Jaurès, n’était pas encore là. » Et il s’en allait les épaules méprisantes. Mais son instinct de mangeur de chair l’arrêtait, fixe, devant les boutiques où il y a des viandes étalées ; depuis des semaines, il ignorait la saveur des morceaux tendres des animaux juteux, et, les dents crissantes, il enviait l’opaque sang coagulé. La salive lui humectait la langue, surtout à l’acide parfum des salaisons, et, une maison célèbre : « J. Poiré et fils » le tentait douloureusement. L’estomac avide, comme une terre calcinée crie après la pluie, le jette sur les lards apai-