Page:Luzel - Contes populaires, volume 2, 1887.djvu/340

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dormira, tu placeras, sur une seule ligne, neuf bassins de cuivre remplis de lait doux, depuis l’entrée de la caverne jusqu’à un grand chêne, qui en est à environ deux cents pas, et sur lequel tu monteras. Tu disposeras les bassins à vingt pas l’un de l’autre, et, dans les intervalles, tu sèmeras des morceaux de pain blanc trempés dans le lait, que le Satyre mangera, tout en marchant, ce qui l’empêchera de lever les yeux et de t’apercevoir, sur l’arbre où tu te tiendras. A mesure qu’il boira du lait, il perdra de son venin et de sa puanteur, et quand il sera arrivé sous ton arbre, après avoir épuisé les neuf bassins, tu crieras : « Holà, Satyre, te voilà pris[1]. » Alors, il lèvera la tête et sourira, à sa guise, en te voyant sur l’arbre. Tu descendras aussitôt et lui passeras un licol au cou, sans qu’il oppose aucune résistance, et il te suivra, doux et tranquille comme un agneau. Tu le conduiras au palais du roi, et là, il dira des vérités qui étonneront tous ceux qui les entendront.

Voilà, mon enfant, comme tu devras te conduire, pour mener ton entreprise à bonne fin. Et maintenant, je te fais mes adieux, car tu ne me reverras plus.


  1. D’après ce qui précède, le Satyre ou Santirine de notre conte semble être un animal d’une nature vague, et peut-être un serpent, à cause de son goût pour le lait doux ; pourtant, plus loin, page 331, on dit qu’il ressemble à un poulain