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JEANNE LE ROUX [1][1]
PREMIÈRE VERSION.
________


I

  Ecoutez tous, et vous entendrez
Un gwerz nouvellement composé,
Qui a été fait à Jeanne Le Roux,
La plus jolie fille qui marche dans sa paroisse.

  Jeanne Le Roux disait
A son père et à sa mère, un dimanche matin :
— Il faut dire que vous n’êtes pas sages.
De fixer pour le jour de ma noce un dimanche ;

  Et pourtant vous entendez dire depuis longtemps
Que le sieur La Tremblaie (1) est dans le pays ;
Et pourtant vous entendez dire et vous voyez
Que le sieur La Tremblaie cherche à m’avoir ! —

  Son père et sa mère dirent
A Jeanne Le Roux, sitôt qu’elle parla :
— Le trouve mauvais qui voudra.
Votre noce sera faite le dimanche ;

  Votre noce sera au point du jour,
La Tremblaie ne sera pas encore levé —
………………. .

II

  Jeanne Le Roux disait
A monsieur le recteur, le dimanche matin :
— Hâtez-vous, monsieur, faites diligence.
J’entends mettre le feu à la mèche ! —

  Elle n’avait pas fini de parler,
Que l’église et le porche étaient pleins ;
Que l’église et le porche étaient pleins
Des soldats de La Tremblaie.


Le sieur La Tremblaie dont il est question dans cette chanson était un des plus célèbres capitaines tenant pour le roi, en Bretagne, sous la ligue. Il défendit vaillamment Moncontour contre les entreprises du duc de Mercœur. En l’année 1591, secondé par un corps de troupes anglaises, envoyé par la reine d’Angleterre, sur la demande des États de Nantes, il enleva l’île de Bréhat aux Ligueurs. La tradition locale veut que la scène qui a fourni le sujet de notre gwerz se soit passée a Paimpol, où séjourna à cette époque le capitaine La Tremblaie. Du reste les deux premiers vers de la seconde version le disent clairement :

Les plus jolies filles qui soient sous le soleil,
Sont les filles de Le Roux, de Paimpol.

  1. (1) Une version de cette chanson, extraite de la collection de M. de Penguern, a été publiée dans l’Athenaeum français, en 1855. Elle diffère peu de la nôtre.