— Vous auriez cinq cents écus, que vous ne l’auriez pas,
Car il n’y a pas dans la compagnie de soldat qui me plaise autant que lui. —
Quand j’étais à Roz-Julou, dans mon lit, bien couché,
J’entendais les filles du Roudour chanter la chanson de mon fils.
Et moi de me tourner du côté du mur et de commencer à pleurer :
Seigneur Dieu ! Sylvestre chéri, où es- tu à présent ?
Peut-être es-tu mort à cinq cents lieues de moi,
Tes chers os jetés aux poissons à manger !
Tes chers os jetés à manger aux poissons,
Si je les avais maintenant, je les embrasserais.
J’ai un petit oiseau, ici, près le seuil de ma porte,
Entre deux pierres, dans un trou du mur ;
Entre deux pierres, dans un trou du mur,
Et je me trompe s’il n’est pas à couver.
Si mon oiseau vient à lever (faire éclore), à faire bonne année,
Je ferai que mon oiseau chéri aille voir mon fils.
— Oh ! oui, écrivez-lui votre lettre, cher vieillard, quand vous voudrez,
Je suis prêt à la porter tout de suite, à votre requête. —
Quand la lettre fut écrite, mise à l’oiseau dans le bec.
Vers Metz en Lorraine avec lui elle partit
— Arrêtez-vous, cher Sylvestre, lisez cette lettre-ci,
Qui vous est envoyée par votre père, qui est chez nous. —
— Descendez, petit oiseau, au bord de mon navire (?)[1][1]
Que je vous écrive une lettre à porter à mon père à la maison ;
Que je vous écrive une lettre pour lui dire
Que dans quinze jours, à partir d’aujourd’hui, je me trouverai auprès de lui —
— Bonjour à vous, petit oiseau, à présent que vous êtes revenu ;
Mon cher Sylvestre est-il bien portant, si vous l’avez vu ? —
— Oui, Sylvestre se porte bien, je lui ai parlé,
Dans quinze jours, à partir d’aujourd’hui, il se trouvera ici... —
Pendant que le père affligé se lamentait,
Son fils chéri Sylvestre était au seuil de la porte à l’écouter.
- ↑ (1) La chanteuse prononçait ablest, mot inintelligible ; elle devait peut-être dire ma lestr, mon navire. Peut-être aussi le mot ablestr désigne-t-il quelque partie d’un navire, puisque, comme nous l’avons vu au vers 10, Sylvestrik était marin, quoique son père lui envoyât son petit oiseau à Metz en Lorraine.