Page:Luzel - Légendes chrétiennes, volume 2, 1881.djvu/289

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vivement de quitter si tôt sa jeune femme, qu’il aimait plus que jamais et qu’il laissait enceinte.

Jeanne gagna la sage-femme de sa sœur, à force d’argent, et obtint d’elle que, aussitôt la princesse accouchée, elle substituerait un petit chien à l’enfant nouveau-né.

Quand son temps fut venu, la princesse donna le jour à un fils, un enfant superbe ; mais la sage-femme traîtresse le jeta aussitôt par la fenêtre et présenta à la mère un petit chien, qu’elle avait eu soin de se procurer à l’avance[1].

— Dieu ! que me montrez-vous là ? s’écria Marguerite à cette vue.

— Hélas ! madame, c’est la volonté de Dieu, et le mieux est d’accepter sans murmurer ce qu’il nous envoie, répondit la diablesse.

— Et que dira mon mari, grand Dieu ? Il faudra ne lui rien dire de ceci avant son retour de la guerre.

Et voilà la pauvre mère bien désolée. Quant à Jeanne et à la sage-femme, elles ne perdirent pas de temps pour écrire au prince, à l’armée, et lui dire que sa femme était accouchée d’un petit chien. Le prince se contenta de dire :

  1. Cette substitution de petits chiens ou petits chats à des enfants nouveau-nés, faite par des marâtres ou des traîtres, en l’absence du mari qui est à la guerre, est très-fréquente dans les traditions populaires.