Page:Luzel - Légendes chrétiennes, volume 2, 1881.djvu/378

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lui-même que ce matou noir. Si vous l’aviez entendu, au moment de mourir !… C’est peut-être, aussi Iouenn Bleiz, qui se change à volonté en différentes sortes d’animaux, assure-t-on. Dans tous les cas, apporte-nous à chacun une bonne écuellée de cidre.

Et il jeta le chat mort dans un coin.

Au même moment, le chat du moulin, un grand matou tigré, sauta d’un bond sur la table, en poussant un miaulement effrayant. Son dos se voûta, sa queue se raidit, son poil se hérissa, et ses yeux lancèrent des flammes. La meunière prit son balai pour le chasser ; mais il sauta sur le bahut de chêne et dit :

Marw ê Raoul ! — Raoul est mort ! Tu as tué Raoul, notre roi ; malheur à toi, Malo Kerdluz !

Et aussitôt il disparut, et on ne le revit pas de deux jours.

Nous étions étonnés et effrayés d’avoir compris ses menaces, comme si un homme avait parlé.

Je partis, après avoir vidé mon écuelle, un peu impressionné de tout ce que j’avais vu et entendu, et n’en augurant rien de bon pour Malo.

Quinze jours plus tard, passant par Kervégan, j’entrai au moulin, et j’appris que le pauvre Malo était mort et enterré. Voici ce que me raconta sa femme :