Page:Luzel - Légendes chrétiennes, volume 2, 1881.djvu/93

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et ne le reconnut pas encore ; puis elle ouvrit l’armoire en tremblant. Mais, au premier regard qu’elle y jeta, elle poussa un cri de joie. Qu’avait-elle donc vu ? Son enfant, qu’elle y avait déposé mort il y avait quelques heures, y était toujours, mais plein de vie et souriant, et jouant avec des oranges qui se trouvaient là. Elle l’enleva dans ses bras, et le couvrit de baisers et de larmes de joie et de bonheur.

Puis elle voulut l’aller montrer à tous ses invités, dans la salle du festin. Mais le vieux, mendiant l’arrêta, et lui dit, en montrant l’enfant du doigt :

— Voilà le mets dont je veux manger ma part.

La pauvre mère poussa un cri, comme si on lui eût plongé un poignard dans le cœur, et cacha son enfant dans son sein. Mais l’impitoyable mendiant reprit :

— Vous avez donc oublié déjà la promesse que vous fîtes au vieil ermite de ne jamais rien refuser à aucun mendiant, quoi qu’il pût vous demander ?

— C’est vrai, hélas ! répondit-elle avec résignation. Voilà mon enfant ; disposez-en comme vous l’entendrez, et que Dieu ait pitié de moi.

Et elle remit l’enfant au mendiant. Celui-ci prit alors un grand couteau sur la table de la cuisine et le leva, comme pour frapper l’inno-