Page:Luzel - Soniou Breiz Izel vol 1 1890.djvu/215

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   Voilà, mon ami cher, qu’elle est désolée, ta maîtresse,
Le reste de ses jours s’écoulera dans la tristesse ;

   Le reste de ses jour s’écoulera dans la tristesse,
Elle ne fait que verser des larmes dans la désolation et l’angoisse.

   Il en est parmi les siens à qui la fantaisie est venue
De la vouloir marier contre sa volonté.

   Ce sont gens qui lui sont à coup sûr apparentés,
Moi, j’ai fait mon possible, et je n’y suis pour rien.

   — Petit oiseau de Saint Nicolas, tu es bon à mon endroit[1] ,
Va pour moi jusqu’à elle. — J’ai fait mon possible.

   — Si elle est allée se coucher, entre vite en sa chambre,
Et donne-lui ma lettre, sans faire de cérémonies.

   Voilà l’oiseau parti alors, incontinent,
Pour présenter la lettre à ma maîtresse, dans sa chambre ;

   Pour lui présenter ma lettre cachetée,
Qu’il avait à grand’peine emportée dans son vol.

   Ma maîtresse, qui était sage, la lut avec lenteur.
L’eau de ses deux yeux mouillait le papier,

   En venant à considérer quels touchants propos
Je lui avais écrits, en brèves paroles.

   L’oiseau s’en retourne pour me consoler,
Avec une lettre dans le bec, pour m’apporter réponse.

   Quand je reçus sa lettre, mon cœur bondissait,
Comme un petit agneau au soleil, au mois de mai.


Keranborgne, 1847.
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  1. Les paysans bretons appellent le Martin-pêcheur l’oiseau de Saint Nicolas.