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RIENZI.

mercenaires, sous le commandement de Pépin de Minorbino, napolitain moitié noble, moitié bandit (une des créatures de Montréal), entrèrent dans la ville, s’emparèrent de la forteresse des Colonna, et envoyèrent un héraut dans la cité, proclamer au nom du cardinal-légat, la mise à prix, au taux de dix mille florins, de la tête de Cola de Rienzi.

Alors la grande cloche du Capitole lança dans les airs ses sons aigus, vain appel ! l’inspiration n’était plus : le peuple, nonchalant, découragé, terrifié par le caractère redoutable, au point de vue spirituel, de l’autorité papale, crainte plus grande encore depuis l’éloignement du siége pontifical, le peuple vint sans armes au Capitole, et là, sur la place du Lion, parut aussi le tribun. Ses écuyers, au bas de l’escalier, tenaient son cheval de bataille, son casque, et cette même hache de guerre qui avait étincelé à l’avant-garde d’une armée victorieuse.

À ses côtés étaient quelques-uns de ses gardes, les gens de sa suite et deux ou trois des principaux citoyens.

Il se tenait droit, la tête nue, contemplant la foule confuse, interdite, sans armes, avec un regard de dédain amer, mêlé d’une profonde pitié ; et lorsque la cloche eut cessé ses tintements et que la foule demeura silencieuse et attentive, il lui adressa ces paroles :

« Ainsi donc vous voilà revenus ! revenus en esclaves ou en hommes libres ? Une poignée d’hommes armés sont dans vos murs. Vous qui avez chassé de vos portes les chevaliers les plus fiers, les guerriers les plus expérimentés de Rome, allez-vous succomber maintenant à cent cinquante mercenaires étrangers ? Voulez-vous prendre les armes pour votre tribun ? Vous gardez le silence ? Qu’il en soit ainsi. Voulez-vous prendre au moins les armes pour vos propres libertés, pour votre Rome enfin ? Toujours même silence ! Au nom des saints qui règnent sur les trônes abattus des dieux païens,